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"Au coeur du mensonge" |
Notre part d'ombre.
Claude Chabrol a concocté un film en trompe-l'oeil : ce n'est pas l'assassinat de la petite fille qui perturbe tant René mais le journaliste vedette Desmot (Antoine de Caunes) qui tourne autour de sa femme. Il faut dire que le beau parleur porte bien son nom, Germain-Roland sait flatter le beau sexe. Star du petit écran et romancier, Desmot est un dandy, un fat, un personnage creux, une tête à claques. Son sourire forcé et son goût pour les aphorismes énervent René. Viviane le trouve distrayant. "Au coeur du mensonge" n'est pas un film très passionnant à suivre et les amateurs de Claude Chabrol ne retrouveront pas son humour facétieux : plutôt que de plonger le spectateur dans une histoire policière captivante, le réalisateur a préféré mettre en scène un film dramatique autour du personnage tourmenté de René. Son attitude fiévreuse impose un climat lourd et pesant qu'accentue la photo très sombre de Eduardo Serra. Cette noirceur n'est pas contrebalancée par le personnage léger de Desmot. Si l'atmosphère est tendue, c'est parce chacun avance masqué : l'épouse parfaite n'est pas sans reproche, René est beaucoup plus solide qu'il n'y paraît et tout à fait lucide, Desmot le séducteur en vacances n'est pas là par hasard... Si les gens mentent, c'est pour dissimuler leurs pulsions les moins avouables. Pour Claude Chabrol, chacun possède une double personnalité, nous sommes tous des docteur Jekyll et Mister Hyde : I kill, I hide (je tue, je cache). Le cinéaste continue, de films en films, à révéler notre part d'ombre. Que ce soit l'ami de René, le couple de retraités ou la commissaire chargée de l'enquête, personne n'est vraiment aimable ou digne de confiance dans ce monde. Une fois encore, Chabrol ne présente pas la nature humaine sous son meilleur jour. "Au coeur du mensonge" fait partie de ses films les plus désenchantés.
Florence Guernalec
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