thé,
crackers et cinéma
c r i t i q u e s |
|
|||
"Chapeau melon |
La guerre des sexes n'aura pas lieu. Le début de "Chapeau melon et bottes de cuir" est assez réussi, le cinéaste, fidèle au concept de la série, montre bien le choc de culture entre monde ancien et monde moderne incarné par l'opposition de style entre John Steed (Ralph Fiennes), le conservateur, garant des valeurs de la vieille angleterre et Emma Peel (Uma Thurman), la femme libérée et forte qui ne s'en laisse pas compter par la gent masculine... Lorsque Mrs Peel entre, en coup de vent, dans un club réservé aux hommes et retrouve Steed au sauna où celui-ci lit le journal dans le plus simple appareil, elle fait vaciller les règles de l'establishment. Cette scène savoureuse est un superbe hommage à l'esprit malicieux de la série culte. Au centre du conflit donc, la femme moderne qui fait naître une guerre des sexes. La lutte contre les ennemis de l'Angleterre n'est qu'un prétexte pour mettre Steed et Mrs Peel en compétition. Comme dans la série, les deux héros ne cessent de se lancer des défis, un jour un combat à l'escrime, un autre, une partie d'échecs. Des dialogues riches en sous-entendus, font partie des piques à fleuret moucheté que s'envoient les deux héros pour comparer leurs mérites. Cet attitude, hostile en apparence, ressemble à un flirt à peine voilé. L'ennui, c'est que les auteurs du film ont donné le bon rôle à Emma Peel en lui faisant remporter haut la main toutes les épreuves qui l'opposent à Steed, dès lors le film n'a plus lieu d'être puisque la guerre des sexes annoncée s'évanouit dans la nature. Et si Steed se méfie autant de Emma Peel dans le film, c'est parce qu'elle est soupçonnée d'intelligence avec l'ennemi et non, comme dans la série, parce qu'elle représente une menace pour lui et le sexe fort. Le réel danger annoncé avec humour dans la série, c'est la femme (libérée), pas ceux qui veulent porter atteinte à la sécurité de l'Angleterre et du monde. Jeremiah Chechik s'éloigne donc de l'esprit révolutionnaire de la série pour se focaliser sur Sean Connery qui interprète le méchant capable de faire la pluie et le beau temps sur tout la planète et de plonger n'importe quel pays dans le chaos. L'idée est intéressante et certaines images de tempêtes ne manquent pas de poésie cependant Jeremiah Chechik n'échappe pas à la banalité et à la faute de goût, le réalisateur cède au penchant américain pour les explosions et les mitraillages. Enfin, l'interprétation n'est pas très convaincante, Ralph Fiennes et Uma Thurman sont un peu guindés, ils n'ont pas réussi à exprimer l'humour pince-sans-rire des personnages, ils évoluent dans cet univers intemporel avec l'assurance d'un condamné à mort se rendant à l'échafaud. Si "Chapeau melon et bottes de cuir" n'est pas un bon film, il a l'avantage de nous faire aimer davantage l'Angleterre : le tea time, un moment sacré de la vie anglaise, le cricket, un jeu que tout étranger trouve ennuyeux, et le flegme britannique, Steed et ses imparables "indeed".
Florence Guernalec
|
||