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"Conte d'automne"
de Eric Rohmer



synopsis

fiche technique

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Un bon cru.


Il y a deux Eric Rohmer : l'un agaçant, l'autre charmant. L'un s'emmêle les pieds dans son univers confiné, l'autre transcende son style et parle un langage universel. "Conte d'automne" fait partie de ses comédies les plus plaisantes, les plus amusantes et rend d'une humeur légère. La différence entre les deux Rohmer tient à peu de choses puisque le cinéaste raconte toujours les mêmes histoires, rien ne l'intéresse plus que la comédie des sentiments. Ses personnages sont toujours aussi indécis, ses héros ont des théories sur tout et ne sont sûrs de rien, ils ne peuvent vivre que des relations amoureuses compliquées.

En général, personne n'a envie de passer ses vacances avec une héroïne rohmérienne, ici, Isabelle (Marie Rivière) et Magali (Béatrice Romand) sont tout à fait fréquentables. Dans ses films, on déteste par dessus-tout, le jeu décalé des acteurs, là, les comédiens sont naturels.

Dans un Rohmer, on a envie que les personnages se taisent, ici, on prend plaisir à entendre ces quadra parler d'amour, de leur peur de ne pas plaire, d'être ridicule. En général, ses héros tiennent des discours creux sur tout et n'importe quoi, dans "Conte d'automne", ils parlent simplement des choses de tous les jours. Eric Rohmer a imaginé des dialogues et des situations qui sonnent juste, vrai comme lors de la rencontre entre Magali et Gérald (Alain Libolt) et celle avec le prof de philo (Didier Sandre) : dans les deux cas, les personnages échangent des banalités, mais avec le premier prétendant, une complicité s'instaure naturellement, avec le second, un malaise gênant envahit les deux coeurs solitaires.

En général, les scripts de Eric Rohmer reposent sur une situation très mince et fragile. Ils ne contiennent ni progression dramatique, ni rebondissements qui pourraient surprendre le public et le captiver, dans "Conte d'automne", le cinéaste s'appuie sur un scénario ludique très construit. Les amis de Magali complotent dans son dos pour lui trouver un compagnon, le spectateur se retrouve complice de ces grandes manoeuvres. Comme dans une comédie policière, le public anticipe d'abord puis savoure les situations montées de toute pièce par les "fauteurs de troubles", il a envie de savoir si les manigances des uns et des autres vont réussir.

Habituellement, le cinéaste met en scène une carte du tendre, ses personnages déploient tout l'éventail de leur discours amoureux pour séduire, dans "Conte d'automne", le cinéaste innove, il filme ce qui se passe avant la rencontre, lorsque que l'on parle de l'autre sans le connaître, qu'on s'imagine le pire sur son compte, surtout le pire.

Bref, il ne reste plus à Eric Rohmer qu'à filmer la suite.

 

Florence Guernalec

 

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