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"Happiness"
de Todd Solondz




synopsis

fiche technique

site officiel

Ronflant.


Des physiques passe-partout et des vies de monsieur tout le monde, les personnages de "Happiness" paraîssent, à première vue, terriblement banals. Todd Solondz s'invite chez eux et va voir ce qui se passe dans leurs chambres à coucher. Le cinéaste américain révèle une misère sexuelle, certains personnages nagent même dans les eaux troubles de désirs et de pulsions incontrôlables. Le réalisateur traite leurs névroses comme leurs échecs sentimentaux sur le mode de la comédie : parce qu'ils peuvent se montrer maladroits, ridicules, minables ou bêtes, on rit de bon coeur à voir les personnages tenter d'assouvir leur fantasmes ou simplement chercher leur alter ego, comme on rit à un exercice de style drôle mais gratuit.

Todd Solondz s'est pris les pieds dans le tapis : l'empêcheur de tourner en rond traite sur le même plan un pédophile, un obsédé sexuel, une névrosée, une femme facile et un coeur solitaire. Il mélange tout. Il n'y a plus de norme, ni de frontière puisque tous sont également coupables de rechercher un partenaire et sont bien punis. Solondz cloue au pilori le sexe, responsable des folies et du comportement agressif des Hommes, tant il est vrai qu'il n'est point question d'amour dans ce film. Le spectateur "normal" aura dû mal adhérer à ce discours du "tous malades". A aucun moment, il ne s'identifiera aux personnages même si le cinéaste met en scène des américains "ordinaires". Todd Solondz a de la compassion pour eux parce qu'il ne les juge pas responsables de leurs déviances. Pour lui, la véritable cruauté de la vie, c'est que tout le monde n'a pas normalement accès au bonheur.

Sinon "Happiness" n'a rien d'un film provocant ou dérangeant dans la mesure où Todd Solondz a pris soin de ne pas montrer les actes les plus ignobles. Le réalisateur donne néanmoins dans le sensationnel, les scènes entre le Docteur Maplewood et son fils semblent destinées à un reality show où l'animateur, ici Solondz, met en place un faux suspens pour assouvir le voyeurisme du spectateur : répondant aux questions du gamin de onze ans sur son sexe, le père pédophile est prêt à lui donner des cours pratiques. Et lorsque que le pré-ado lui demande ce qu'il a fait exactement avec ses camarades de classe, on a la mauvaise surprise de constater que Todd Solondz raconte tout, le cinéaste prend son temps pour distiller les actes du père, chaque nouvelle question du fils nous rapprochant d'un pas dans l'immonde.

A trop vouloir jouer les mauvais garçons, Todd Solondz tombe dans le piège de la complaisance et révèle, malgré lui, toute l'inanité de son film.

 

Florence Guernalec

 

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