thé,
crackers et cinéma
c r i t i q u e s |
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"Lautrec" |
Trop de théâtre tue le cinéma. A en croire le réalisateur, la vie parisienne de cette fin de XIXe siècle, ressemble à un spectacle de french cancan : un enthousiasme débordant et une insouciance - presque - sans bornes. L'homme de théâtre y a sans doute trouvé des correspondances avec les sensations éprouvées sur les planches. Malheureusement, Roger Planchon n'a pas cherché à traduire sur grand écran, la démesure et l'énergie des spectacles vivants, il s'est contenté de l'enregistrer, il a trop rêvé de théâtre, et pas assez de cinéma. Ainsi, le réalisateur privilégie les mouvements de groupe, les comédiens envahissent de force le décor, ils ne marchent pas mais courent de part et d'autre d'une scène imaginaire comme dans la séquence d'intronisation de Lautrec dans le cours de peinture. Dans le même esprit, le jeu de cache-cache entre la Valadon et les amis de Lautrec au Chat Noir, est filmé comme une pantalonnade. Côté dialogues, Roger Planchon tente de retranscrire le langage fleuri, la gouaille de ce petit peuple parisien qui a de la répartie et aucun tabou. Les acteurs prennent un ton enjoué, forcé, en toutes circonstances. Ils surjouent comme au théâtre. L'exubérance des costumes et décors, de la musique, font même penser aux comédies musicales américaines programmées sur Broadway. Roger Planchon n'a pas eu peur de faire toc, de sonner faux, kitsch. En deux heures de film, Roger Planchon montre donc peu la peinture de Toulouse Lautrec (Régis Royer), une toile n'est pas un sujet en soi. La personnalité du peintre tel que la décrit le réalisateur, est attachante : Lautrec le dandy est enfantin, il a cette capacité à s'émerveiller de tout, à aimer d'emblée les gens. A Paris, celui que ses compagnons appellent affectueusement "le nabot", "morpion", "petit", trouve vite sa place dans le monde du spectacle. Sa difformité physique se marie bien avec la "difformité" sociale des prostituées, des marginaux et des artistes tels que la Valadon (Elsa Zylberstein) son unique amour, Aristide Bruant (Jean-Marie Bigard) ou Van Gogh. "Lautrec"
est l'oeuvre d'un bon vivant qui croit à l'esprit de troupe et
à la fête. Le film d'un tel homme ne peut pas être
totalement mauvais. Florence Guernalec
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