Un bon moment.

Les héros "ont du plomb dans l'aile". Allongé sur le ventre, dans un endroit glauque et crasseux, Porter (Mel Gibson) n'en mène pas large : un homme avec une tête de boucher-charcutier, lui extrait deux balles de son dos. On lui a tiré dessus pour lui voler 70 000$ et il a bien l'intention de récupérer son argent. Sur une musique conquérante, le générique raconte, en quelques scènes, la renaissance de Porter, son retour dans le monde des vivants. La mise en place de "Payback" est rapide et efficace, Brian Helgeland ne perd pas de temps. La vengeance est en marche. 

Ambiance et photo sombre pour un film qui se déroule dans un milieu de gangsters, dans "Payback", les problèmes se règlent à l'arme automatique. Intelligent et têtu, Porter le truand va être confronté à des hommes de son espèce mais pas de son calibre : Val qui lui a piqué sa part du butin, "l'organisation" une sorte de mafia locale qui détient l'argent, les chinois à qui Porter a volé les dollars, le tout sous l'oeil de policiers corrompus qui comptent bien empocher les billets.

Brian Helgeland, rendu célèbre pour son travail sur le script de "LA Confidential", s'inspire une nouvelle fois du film noir mais l'adapte au monde contemporain, "Payback" prend ses distances avec le genre sans tomber dans la parodie : si Brian Helgeland flirte avec le second degré, il ne franchit pas la limite, l'histoire reste crédible même si les personnages sont assez grotesques comme la petite amie sado-maso de Val. "Payback" n'est pas un film cynique, le cinéma n'y est pas démystifié et le spectateur n'est pas pris pour un imbécile : en un mot, les méchants sont vraiment méchants et Porter risque sa vie pour quelques malheureux dollars. 

Dans cet univers violent et sans pitié, Brian Helgeland laisse pas mal de champ à l'humour, notamment à travers le personnage de Porter, mais attention, cet humour-là est bien plus subtil que les grimaces et les commentaires au ras des pâquerettes de Mel Gibson dans la série "L'Arme fatale" : si "Payback" est un film vraiment amusant, c'est parce que Porter est quelqu'un de rusé mais il n'est pas pris au sérieux et comme ses adversaires se moquent de ses menaces, il doit sévir de manière bête et méchante. Ce malentendu court tout au long du film : personne n'arrive à comprendre que le petit truand ne réclame pas de dommages et intérêt, et qu'il s'attaque à "L'organisation" pour trois fois rien.

"Payback" est une oeuvre qui se regarde avec beaucoup de plaisir, Brian Helgeland a signé un premier film stylisé, original, inattendu, intelligent et divertissant.

Florence Guernalec