thé,
crackers et cinéma
c r i t i q u e s |
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"Pourquoi pas moi
? " |
Pétard Mouillé.
Hélas, Stéphane Giusti a vite fait de dilapider le capital sympathie dont jouit son premier film : les personnages manquent trop d'épaisseur pour que le spectateur ait le temps de les connaître vraiment, de s'attacher à eux et de s'intéresser à leur histoire. L'auteur-réalisateur reste au stade des généralités, Stéphane Giusti a été incapable de caractériser ses personnages au-delà des apparences vestimentaires et sociales : il y a Eva, la goudoue look techno, piercing et cheveux décolorés ; Camille, la "camionneuse" romantique en veste et caleçon ; Tony le rebelle rock'n'roll en jeans et perfecto ; le père d'Ariane, bourgeois costard-cravate... Les situations comiques sont censées naître du conflit entre les parents et leur enfants homos, or leurs relations ne sont pratiquement pas montrées. Dans la première partie du film, Stéphane Giusti s'intéresse surtout aux jeunes, le spectateur ne peut donc mesurer les conséquences de leur révélation et se réjouir à l'avance de la bombe qu'ils vont lâcher pendant le dîner. Non seulement Stéphane Giusti n'a pas réussi à créer un effet d'attente mais le réalisateur passe à côté du sujet, sa comédie ne repose pas sur un fond réaliste fort : le cinéaste évoque à peine la peur de ces homos de décevoir leurs parents, l'aveuglement de ceux-ci qui ne s'aperçoivent de rien et leur rêve brisé alors qu'ils imaginaient leurs enfants mariés et assurant la descendance. Leur "coming out" fait l'effet d'un pétard mouillé : la cascade de révélations tombe à plat car elles ont un effet répétitif, Stéphane Giusti filme les réactions épidermiques des parents sans nuancer leur attitude selon leur personnalité, l'effet comique dû au malaise qui s'empare d'eux, n'est donc pas prolongé et amplifié.... Le réalisateur n'exploite pas bien les différences : entre les artistes de bals et les bourgeois en passant par José et Malou, couple kitsch - il est ex-torero et elle élève des lévriers, il y avait de quoi écrire des scènes plus drôles et intéressantes que le père d'Ariane envisageant de trouver une bonne clinique à sa fille pour la faire soigner ou Malou téléphonant à sa famille pour savoir s'il n'y a pas déjà une lesbienne dans l'arbre généalogique. Stéphane Giusti semble avoir confondu comédie et légèreté du scénario. Ses dialogues sont d'ailleurs souvent faibles à l'image des conversations entre Camille qui parle comme un héros de BD, et son amante Ariane, l'universitaire pompeuse, le décalage est trop grossier pour provoquer des rires. Le manque de nuance dans Pourquoi pas moi ? révèle plus une carence au niveau de l'écriture qu'une volonté délibérée de donner dans la caricature.
Florence Guernalec
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