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"Wild Wild West" |
Cartoon and Co. Sonnenfeld engage son film sur le terrain glissant du cartoon, il se moque de toute vraisemblance, comme dans cette scène où James West descend, en quelques coups de feu, presque tout un régiment dans le bureau de Loveless. Comme dans les dessins animés, le réalisateur zappe d'une séquence à une autre, les scènes d'action, en particulier, se terminent en queue de poisson : quand le saloon où se trouvent les deux héros, explose, Sonnenfeld passe à une autre scène et le spectateur se demande logiquement ce qu'il est advenu de James West et Artemus Gordon... Wild Wild West se caractérise moins par sa fantaisie que par ce "n'importe quoi" qui amuse dans un premier temps mais lasse assez vite car on comprend que le réalisateur ne nous emmène nulle part et qu'il n'a rien à dire ou à montrer. Résultat, on se contente de suivre de loin, les aventures des deux agents spéciaux comme on se tient vaguement au courant des dernières nouvelles du jour. Un peu distrait. Les acteurs n'ont pas la partie facile dans ce film car leurs scènes sont continuellement parasitées par l'irruption de gadgets idiots, de sorte qu'ils finissent par ressembler à de vulgaires démonstrateurs en pleine foire commerciale. Will Smith tente son numéro de charme habituel, sourire jusqu'aux oreilles et allure cool, mais sa vraie performance tient dans une seule scène où habillé en femme, il émoustille le libidineux Loveless. On entr'aperçoit Kevin Kline, avec son profil aristocratique et son air pince-sans rire, mais le délicat Artemus Gordon disparaît trop souvent sous les déguisements. La partie de ping-pong verbal attendue entre les deux acteurs tourne court à cause d'un humour pataud qui ne permet pas aux héros de briller, ni de surclasser leurs adversaires : les allusions à une homosexualité latente entre les deux agents spéciaux sont répétitives et lourdes, les amabilités que s'envoient James West et Loveless sur l'infirmité de l'un et la couleur de peau de l'autre, manquent d'esprit. Le personnage de Salma Hayek semble avoir été jeté dans les pattes des deux héros comme on se débarrasse d'un paquet encombrant, Sonnenfeld se moque de son personnage comme de sa première chemise. Quant au Dr. Loveless, il est incarné par un Kenneth Branagh pas très à son aise dans le registre - difficile - du méchant d'opérette : son personnage se voudrait à la fois divertissant, menaçant et pathétique mais il n'est rien de tout cela. L'acteur anglais disparaît sous un déguisement grotesque. Il est clair que les auteurs n'ont pas cherché à retrouver l'atmosphère de la série télé, ils se sont emparés des figures de James West et de Artemus Gordon pour les relooker à la mode d'aujourd'hui, s'attachant à les rendre cool auprès du jeune public. Dans ce spectacle pyrotechnique, Barry Sonnenfeld a perdu en route, son style et son esprit si bien que rien ne distingue vraiment Wild Wild West des blockbusters de l'été.
Florence Guernalec
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